Un soleil présent, en pleine ascension depuis déjà quelques heures, malgré les nuages blanchâtres relativement épais filtrant ses rayons lumineux. Une humidité à la limite du palpable, généralement signe d’une pluie à venir, balayée par la brise matinal à la fraicheur appréciable ; C’était là un spectacle représentatif de la facette généreuse du printemps, s’offrant à tous les habitants du village caché des nuages, et plus particulièrement aux yeux du ninja d’élite. Celui-ci scrutait le ciel du regard, l’air détaché du milieu autour, profitant de cette petite pause pour méditer sur le programme à venir. La journée s’annonçait plutôt calme, tant au niveau de la météo que des efforts à fournir. Plus tôt dans la matinée, après un réveil naturel sans interruption de la part d’un messager, le vétéran se prépara avec le rituel quotidien, puis se rendit directement au bureau des missions afin de régler les dernières tâches administratives. Surement un des devoirs les moins passionnants dans le métier, nécessitant cependant tout autant d’attention et de rigueur que le reste. Remplir les rapports de missions, rédiger des avis sur les élèves … toute une paperasse obligatoire, grandissant au fur et à mesure de la montée dans la hiérarchie. L’idée de s’être débarrassé habilement de la chose en amena une autre dans son esprit, concernant son jeune apprenti, fraichement sortit de l’académie. Un seul et non trois. Il ne s’agissait pas d’une équipe habituelle non, mais seulement d’un seul ninja sous sa tutelle personnelle, sur une durée plus longue. Une première depuis le début de sa carrière de Senseï, sachant que les élèves attribués automatiquement par le conseil ne restaient pas plus de la période de passage au grade Chunin. Ce genre de relation différait grandement de la méthode classique, puisqu’elle impliquait un enseignement complet en tout point, concentré sur la personne en question. Une méthode peu courante, surtout à cause des qualités requises chez le professeur même, se devant de maitriser d’avantage que les bases, souvent de grade supérieur aux Junins standard donc. Le vétéran n’avait pas pris cette décision à la légère, d’autant plus que le concept lui trottait dans la tête depuis déjà un bon moment, à l’origine de nombreuses remises en question. Elle revenait là lentement, découlant d’une succession de pensées, mais se vit interrompue par le brouhaha de la foule autour, en bruit de fond depuis tout à l’heure, ressurgissant sur une excitation.

L’activité des rues commerçantes s’intensifiait de minutes en minutes, avec les stands criant leurs marchandises au loin, ainsi que les boutiques remontant doucement leurs stores. Interpellé, le Samouraï descendit son regard du ciel afin de le reposer devant et voir toutes ses personnes courir partout, faire des achats rapidement ou simplement contempler certaines expositions. La masse se composait de mères de familles, profitant de l’absence des petits garnements déposés au préalable à l’académie, des étrangers venant simplement gouter ou découvrir les marchandises du Pays de la Foudre, ou encore des nobles désirant se reposer de leurs responsabilités. Cette mixité provoquait inévitablement une agitation dérangeante, cependant cela signifiait aussi que le village se portait plutôt bien malgré les évènements récents. Un constat rassurant, auquel l’homme d’expérience montra une petite réaction de soulagement en soufflant légèrement, les lèvres entrouvertes, avant de croiser le regard d’un de ses collègues à travers les habitants. Celui-ci devait surement être en ronde à travers les rues, chargé d’assurer la sécurité, visiblement en pause au vue de l’expression détendu sur le visage et de son salut. Takasugi acquiesça, ne le rendant pas directement dans la forme, mais confirmant par la même occasion l’absence de soucis particulier dans le coin. Lui-même n’avait pas de mission en cours, ayant réservé la journée à la préparation de son apprenti, ce qui justifiait par la même occasion sa position actuelle. En effet, il s’était installé confortablement sur une caisse solide en bois, le dos plaqué contre la bâtisse dressé juste derrière, le bras droit rentré dans le haut de sa tenue. Son corps se laissait bercer ainsi, caressé sur la peau par le vent léger balayant les rues commerçantes et le tissu ondulant laissant passer cette douce fraicheur. Un moment de tranquillité précieux, dont l’homme d’expérience utilisa à bonne escient, avant de se relancer dans la course du métier de soldat. Sa tête tourna, un coup à gauche, un coup à droite, jusqu’à croiser les horloges disposées sur les poutres de bois d’un des stands, puis bloqua un instant, interpellé de l’heure indiqué. Non, ce n’était pas encore le moment d’aller retrouver le ninja débutant, juste une autre affaire plus personnelle chez un des commerçants de cette rue. Shinsuke prit appuis de ses mains sur la caisse, puis se leva sur une impulsion afin de se retrouver debout, mettant dans le même geste son Kimono en place. Le vétéran se mit enfin en marche après quelques secondes à un rythme assez lent, le regard plutôt neutre ne visant personne en particulier. En réalité, l’unique œil visible sur son visage passait discrètement sur les villageois autours, totalement emporté par les courses, dans le but de décrire rapidement les comportements de chacun, histoire d’assurer la sécurité même en temps de repos. Aucune de forme de perversion, simplement un exercice habituel, qui allait aussi être l’un des sujets du jour, du moins dans le programme prévu dans son esprit. La petite analyse s’arrêta avec l’apparition d’un homme derrière une espèce de comptoir à l’air libre, semblant le reconnaitre de loin, et préparant déjà une boite étrange.

« Hey, Takasugi, pile à l’heure comme d’habitude. On dirait que tu attends ce moment avec impatiente ! »

Le ninja d’élite eut un léger sourire complice sur les paroles de son ami, un homme assez âgé et surtout spécialiste de confiance dans son domaine. De petite taille, le corps assez fragile en apparence, des cheveux déjà blancs, voilà à quoi ressemblait le commerçant, présentant pourtant une forme olympique. Son métier consistait en une seule et unique chose, la fabrication de pipes et calumets, un objet ayant fait son temps mais persistant toujours sur le marché. C’était plus une passion qu’autre chose, dont le vétéran devint rapidement un client fidèle. On ne pouvait pas vraiment qualifier Takasugi de fumeur, puisque son utilisation réelle de l’accessoire restait assez rare, mais en tout cas il en trimbalait toujours un sur lui, de forme spécifique. Plus longue, plus fine et pratique comparé aux modèles classiques, accompagnée d’inscriptions uniques, seul un connaisseur pouvait lui fournir cela sur commande. D’ailleurs, la sienne semblait prête, le commerçant prit la boite dans les mains, puis la tendit à son client tout en l’ouvrant, curieux de voir sa réaction. Le silence prit place, installant rapidement un suspense insupportable, laissé simplement à l’appréciation du Samouraï. Celui-ci s’inclina légèrement, le regard dessinant la marchandise, puis porta sa main sur le calumet afin de l’effleurer légèrement, avant de la saisir et la tourner devant lui, pour en voir tous les recoins. Il marqua ensuite une pause de quelques secondes, avant d’annoncer le verdict.

« Parfait … C’est du très bon travail comme toujours.»

Toute la tension sembla s’échapper d’un coup, soulageant le commerçant qui encaissa en même temps l’argent, encore en train de se remettre de sa satisfaction personnelle. C’était là un rien futile représentant beaucoup pour lui dans son métier … Takasugi continua d’apprécier l’objet de son coté, comme détaché du décor autour. Le genin n’allait pas tarder à venir. En effet, ce stand représentait par la même occasion le point de rendez-vous fixé, surement étrange comme endroit mais choisit minutieusement dans un but précis. Une scène de la vie quotidienne. Cela l’intéressait aussi, d’observer la réaction du jeune ninja, après tout son statue relevait plus du disciple que du simple soldat de bas rang.